Apparitions mariales et catéchèse ?

Le temps pascal coïncide avec le mois de mai consacré traditionnellement à la Vierge Marie. Aujourd’hui, nous sommes au lendemain de l’anniversaire de la première apparition mariale à Fatima au Portugal. La piété mariale suscite des réactions assez tranchées : les uns souhaitent y introduire les enfants catéchisés, d’autres s’en défendent avec vigueur. Parler aux enfants des apparitions mariales demande souvent de faire le point personnellement sur où nous en sommes dans notre foi par rapport à la Vierge Marie. Voici quelques éléments pour y voir plus clair.

Le temps pascal est une célébration déployée à partir de l’événement de la Résurrection de Jésus-Christ. Nous commémorons ce fait hors du commun : celui qui était mort, déposé dans un tombeau, apparaît vivant (tout en portant les traces de sa passion) à ses disciples. Son corps revit, mais n’est plus soumis aux lois de la nature : Thomas est invité à enfoncer sa main dans le flanc transpercé sur la croix ; les disciples le voient entrer dans la pièce alors que la porte est verrouillée… (cf. Jn 20) Sa résurrection atteste qu’Il est vraiment homme et vraiment Dieu.

Mais la résurrection de Jésus-Christ n’est pas un événement unique. Il a lui-même promis aux disciples qu’il va leur préparer une place et que là où Il sera, ils seront avec Lui (Jn 14,3). C’est une promesse, à nous qui sommes de « ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20,29) que nous aurons part avec Lui à la Résurrection et à la Vie éternelle (cf. Jn 11,25). La première qui en bénéficie, c’est la Mère de Jésus-Christ, et donc la Mère du Fils de Dieu, dont nous célébrons chaque 15 août l’assomption. Elle est vraiment la première en chemin, qui ouvre la route devant nous.

Le destin de Marie, humble servante, est une promesse pour nous : « La Mère de Jésus, déjà glorifiée au ciel en son corps et en son âme, est l’image et le commencement » de ce que nous serons. « Elle brille, devant le Peuple de Dieu en marche, comme un signe d’espérance certaine et de consolation. »[1]

Saint Bernard de Clairvaux parle de Marie comme d’un canal de grâces : Dieu l’a choisie pour être le « canal » par lequel Jésus est venu jusqu’à nous. C’est ainsi que Louis-Marie Grignon de Montfort dira : « C’est imiter Dieu le Fils qui n’est venu à nous que par Marie, et qui, nous ayant donné l’exemple pour faire comme il a fait, nous a sollicités à aller à Lui par le même moyen par lequel il est venu à nous, qui est Marie. » (Secret de Marie) La piété mariale rebutait le jeune séminariste Karol Wojtyla. C’est à la lecture du Traité de la dévotion à la Sainte Vierge de Grignon de Montfort que le futur pape Jean-Paul II a vécu un tournant décisif dans sa vie spirituelle.

Le Concile Vatican II affirme que Marie « qui a conçu le Christ, l’a enfanté, l’a nourri, l’a présenté au Père dans le temple, qui a souffert avec son Fils mourant sur la croix, a coopéré, d’une manière toute spéciale, par obéissance, sa foi, son espérance et son ardente charité »[2] à notre salut accompli par Jésus. « En effet, au ciel, elle n’a pas déposé cette fonction, mais elle continue, par son instante intercession, à nous obtenir des grâces en vue de notre salut éternel. »[3]

C’est ce rôle de « canal » qui peut éclairer la réalité des apparitions mariales. Elles ne viennent pas « compléter » ce que nous croyons, mais plutôt attirer notre attention sur l’essentiel : le fait que la prière est une question vitale, notamment celle du chapelet (Banneux, Beauraing, Fatima) ; que Dieu dans sa miséricorde veut nous guérir de nos maladies physiques et spirituelles et que ces grâces peuvent passer par un moyen aussi simple qu’une source d’eau (cf. Jn 4,14) (Banneux 18 janvier 1933, Lourdes 25 février 1858) ; qu’une chapelle est un lieu de rencontre avec Dieu (Lourdes 3 février 1858 ; Fatima 13 octobre 1917, Banneux 20 janvier 1933, Beauraing 17 décembre 1932) ; que la démarche d’un pèlerinage est importante (Beauraing 17 décembre 1932). Ce qui surprend dans ces apparitions, c’est le fait que ce soient des enfants qui en bénéficient. Les familles, les représentants de l’Église ne pourront pas leur croire sur leur autorité. Ils devront apporter des preuves qui confirmeront l’origine surnaturelle des messages qu’ils reçoivent : à Lourdes, Bernadette répète le nom par lequel l’Apparition s’est présentée pour ne pas oublier parce qu’elle n’y comprend rien… C’est le curé qui sera confondu en entendant de la bouche de la jeune fille l’affirmation dogmatique prononcé par le Pape quatre ans plus tôt : Immaculée Conception.

Les messages des apparitions, transmis par de simples enfants, peuvent être dérangeants, hormis le langage de l’époque. Ce sont toujours des appels à la conversion, difficile d’y rester indifférents.

Notre raison a parfois du mal à reconnaître que tout ne peut pas s’expliquer de manière rationnelle. Parfois, il nous faut devenir comme des petits enfants pour pouvoir entrer dans les voies du Royaume (Mt 18,3). Dans l’Évangile nous trouvons une piste : « si vous ne croyez pas, croyez du moins à cause des oeuvres » (Jn 10,38 ; 14,11) ou encore « c’est à son fruit qu’on reconnaît l’arbre » (Mt 12,33 ; cf. 7,16-20). C’est un des critères pour que l’Église authentifie une apparition : quels sont ses fruits ? Chez le bénéficiaire de l’apparition ? Chez ceux qui viennent en pèlerinage ? Les sanctuaires mariaux sont des lieux de paix et de grâce, des lieux de réconciliation. On s’y sent bien… Autant d’arguments pour ne pas se priver d’un pèlerinage. À l’heure où les lieux d’accueil pour une retraite en résidentiel se raréfient, un pèlerinage dans un sanctuaire peut en être une heureuse alternative.

Pour aller plus loin :

 

[1] Constitution Lumen Gentium § 68.

[2] Constitution Lumen Gentium § 61.

[3] Constitution Lumen Gentium § 62.

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